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Marguerite Duras
Marguerite Donnadieu est née le 4 avril 1914 à Gia Dinh en Indochine, se marie en 1939 avec Robert Antelme. Elle meurt le 3 mars 1996.
Le Square (1955)
- Une fois qu'à vous. [Lu la 15507e journée, vendredi 30 septembre 2011, dans l'édition Folio, p. 38-39]
La mer, je vous avoue d'habitude? [Lu la 15509e journée, dimanche 2 octobre 2011, dans l'édition Folio, p. 56]
- Vous comprenez seule. [Lu la 15510e journée, lundi 3 octobre 2011, dans l'édition Folio, p. 69-70]
- Non plus?
[Lu la
Moderato Cantabile (1958)
Chapitre VII
Le
saumon passe de l'un à l'autre suivant un rituel que rien ne trouble, sinon la
peur cachée de chacun que tant
de perfection tout à coup ne se brise ou ne s'entache d'une
trop évidente absurdité.
[Lu fin août, début septembre 2005, éditions de Minuit, p. 125]
*
Des femmes, à la cuisine, achèvent de parfaire la suite, la sueur au
front, l'honneur à vif, elles écorchent un canard mort dans son
linceul d'oranges. Cependant que rose, mielleux, mais déjà déformé par le temps très court qui vient de se passer, le
saumon des eaux libres de l'océan continue sa marche inéluctable vers sa totale disparition et que la crainte d'un
manquement quelconque au cérémonial qui accompagne celle-ci se dissipe peu à peu.
[Lu fin août, début septembre 2005, éditions de Minuit, p. 126]
*
On rit. Quelque part autour de la table, une femme. Le chœur des conversations augmente peu à peu de volume et, dans une surenchère d'efforts et d'inventivités progressive, émerge une société quelconque. Des repères sont trouvés, des failles s'ouvrent où s'essayent des familiarités. Et on débouche généralement partisane et particulièrement neutre. La soirée réussira. Les femmes sont au plus sûr de leur éclat. Les hommes les couvrirent de
bijoux au prorata de leurs bilans. L'un d'eux, ce soir, doute qu'il eût raison.
[Lu fin août, début septembre 2005, éditions de Minuit, p. 129-130]
*
Le saumon repasse dans une forme encore amoindrie. Les femmes le dévoreront jusqu'au bout. Leurs épaules nues ont la luisance et la
fermeté d'une société fondée, dans ses assises, sur la certitude
de son droit, et elles furent choisies à la convenance de celle-ci. La rigueur
de leur éducation exige que leurs excès soient tempérées par le souci majeur de leur
entretien. De celui-ci on leur en inculqua, jadis, la conscience.
[Lu fin août, début septembre 2005, éditions de Minuit, p. 130]
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La Pluie d'été Vanité, les brothers et sisters ne savaient pas trop ce que c'était. Une sister croyait que c'était quand on mettait des robes trop belles, trop endiamantées. Une autre sister disait: avec du rouge plein la figure en plus des robes. *
Cette
femme d'ailleurs, s'indignait d'être aimée de la sorte par un homme fût-il le
père de ses enfants, parce qu'elle savait, et elle était seule à le savoir,
que personne ne méritait d'être aimé de la sorte par quiconque. Ce qui
faisait que le père vivait dans l'épouvante de perdre cette femme qui à
chaque occasion lui disait qu'un jour, le plus beau de tous, elle se sauverait
de lui. Le père savait que c'était vrai, après tant d'années il le savait
encore. Ernesto aussi le savait. Ainsi le père aimait-il la mère de cette passion fixe, réservée à un autre objet d'habitude et qui, elle, la faisait le fuir et qui, lui, le tuait. |