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Le militant démocate

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Monnaie, immigration et politique protectionniste solidaire[1]

 

[mercredi 04 avril 2012, jeudi 20 avril 2014, mardi 27 octobre 2015, dimanche 1er mai 2016, jeudi 2 février 2017, samedi 25 avril 2020]

 

Extrêmes gauche et droite

Dans les programmes politiques, on voit stéréotypiquement dans les programmes d'extrême-droite ou de droite nationaliste la sortie de l'euro comme monnaie unique, le retour à une monnaie nationale, le contrôle des frontières quant à l'immigration et des marchandises avec un protectionnisme fiscal ; et à l'extrême-gauche, il n'est guère question de la sortie de l'euro, et il y a la promotion de la liberté de circulation des personnes, alors que le Secrétaire Général du Parti Communiste français Georges Marchais avait discouru en 1980 et 1981 contre l'immigration qui faisait diminuer le salaire des travailleurs : « Il faut stopper l'immigration clandestine et officielle. Il est inadmissible de faire rentrer des nouveaux travailleurs immigrés en France alors que notre pays compte deux millions de chômeurs français et immigrés. »[2], comme un siècle plus tôt le député socialiste Jean Jaurès qui déclarait devant l’Assemblée Nationale que « nous protestons contre l’invasion des ouvriers étrangers qui viennent travailler au rabais »[3] ; et encore avant, en 1864, l'Association Internationale des Travailleurs (surnommée la Première Internationale) a parmi ses buts de « lutter contre la mise en concurrence des travailleurs à l’échelle internationale, essentiellement contre le recrutement de main-d’œuvre étrangère pour briser les grèves ou tirer les salaires vers le bas »[4].

Les deux extrêmes ont tort, pour l'extrême-gauche, en étant idéaliste et pas conséquentialiste, c'est-à-dire en n’étant pas écologiste, au sens de s'occuper de l'écosystème ; et dans le cas de la droite d'être discriminatoire. Le projet de l'extrême-gauche est irréalisable sans étapes (avec ces deux proverbes pertinents : « Qui veut faire l'ange fait la bête. », et « Le mieux est l'ennemi du bien. »).

Monnaie

Une monnaie unique n'est bénéfique que dans un même système fiscal[5]. Aux États-Unis, le transfert monétaire entre États peut atteindre un cinquième du budget. Dans l'Union Européenne, c'est un centième. Les peuples européens ne sont pas prêts à verser un cinquième de leurs budgets (par exemple les Allemands vers les Grecs) vers d'autres qui, en tant qu'autre pays, ont une autre politique que la leur, sur laquelle ils n'ont eu aucune responsabilité.

En gardant la même monnaie, la Grèce ne peut pas produire d'inflation, et c'est donc les revenus qui diminuent et la pauvreté intérieure qui augmente.

Il faut donc que chaque pays retrouve une monnaie nationale, étatique, et qu'il y ait pour la facilité des échanges internationaux une monnaie commune (qui ne soit pas une monnaie nationale comme le dollar ou pétrodollar).

Il faut aussi que cette monnaie soit le monopole de la puissance publique nationale.

Protectionnisme

Les capitalistes ultralibéraux ont voulu qu'il y ait libre-échange, et ont introduit la liberté du renard dans le poulailler.

Afin de perpétuer les protections sociales des pays les mieux nantis, plutôt que de les concurrencer par les plus pauvres, il faut instaurer une protection douanière, et taxer les produits importés (marchandises, mais aussi services comme les centres d'appel à l’étranger) selon la différence de salaire et de conditions de travail des pays d'origine. Mais, et cela diffère de l'égoïsme ou de la xénophobie d'extrême-droite, l'intégralité de cette taxation doit être proposée au profit de ces travailleurs à l'étranger, sous le contrôle du pays importateur quand à l'usage de ces finances. Les gouvernements étrangers auraient intérêt à ce que cette monnaie soit effectivement reversée pour la richesse de leurs pays.

Immigration

L'immigration dont on parle politiquement est celle des plus pauvres, des miséreux qui quittent leur pays afin d'essayer de vivre plus dignement dans d'autres pays, et souvent à cause de guerres pour les produits exportés vers les pays riches (pétrole, coltan au Congo), ou la destruction de cultures vivrières traditionnelles[6].

Les immigrés envoient actuellement trois fois plus de monnaie vers leur pays d'origine que les aides internationales[7]. L'"aide" internationale aux pays pauvres serait de 78 milliards de dollars, qui n'arrivent guère à ceux qui en ont besoin ; alors que l'aide des migrants à leurs proches restés aux pays est de 115 milliards de dollars.

Ils préféreraient pour la plupart rester chez eux près de leur famille et amis en vivant dignement, plutôt qu'être contraints à risquer leur vie dans un voyage périlleux vers les pays riches.

Dans les débats nationaux (franco-français ou autres), la gauche et la droite s'étripent en gardant les œillères sur les effets de leur politique à l'étranger.

Afin de maintenir le salariat des travailleurs nationaux, il faut une lutte sévère et dissuasive contre les employeurs sous-payant le travail clandestin, illégal, d'étrangers.

Futur radieux

Il est agréable d'utiliser une monnaie unique, et de voyager à travers l'Europe sans contrôle douanier.

Ceci ne pourra être validement généralisé que s'il n'y a plus de différence énorme entre le paiement des travailleurs des différents États. Ainsi aussi, la production industrielle sera relocalisée dans les produits riches, et l'agriculture vivrière sera aussi plus relocalisée dans les pays riches comme dans les pays pauvres, ce qui sera un bienfait contre la famine, et contre les coûts de transport (en temps, en pollution, en accidents).

Métaphoriquement, on ouvre les écluses lorsque l'eau est au même niveau des deux côtés.


 

[1] Je préfère parler de protectionnisme solidaire plutôt que xénophile ou altruiste car la solidarité implique le lien à équilibrer entre soi et autrui, alors que la xénophilie et l’altruisme insistent sur la partie d’autrui, éventuellement au détriment de soi.

Le mercredi 16 janvier 2013, je découvre dans le livre Inévitable protectionnisme de Franck Dedieu, Benjamin Masse-Stamberger et Adrien de Tricornot (Gallimard, 2012), chapitre 12, p. 189, que déjà en 2000 dans Le Monde diplomatique, Bernard Cassen avait proposé ce concept de « protectionnisme altruiste » : « Inventer ensemble un « protectionnisme altruiste » » : http://www.monde-diplomatique.fr/2000/02/CASSEN/2127.

 

[3] Discours de Jean Jaurès du 17 février 1894  :

« Oui, nous devons protection au petit propriétaire, cultivateur, au métayer obéré, au fermier dans la peine. Et voici pourquoi, au point de vue socialiste, je ne me sens pas gêné de leur accorder une protection.

C’est parce que pour ceux-là, comme je le disais tout à l’heure, la forme même du salaire, c’est le prix du produit, et quand nous leur assurons à ces ouvriers de la démocratie rurale le minimum de salaire que nous réclamons pour la démocratie ouvrière.

Et de même, nous protestons contre l’invasion des ouvriers étrangers qui viennent travailler au rabais.

Et ici, il ne faut pas qu’il y ait de méprise : nous n’entendons nullement, nous qui sommes internationalistes… […] Vous entendez bien que ce n’est pas nous qui voulons éveiller entre les travailleurs manuels des différents pays les animosités d’un chauvinisme jaloux ; non, mais ce que nous ne voulons pas, c’est que le capital international aille chercher la main d’œuvre sur les marchés où elle est le plus avilie, humiliée, dépréciée, pour la jeter sans contrôle et sans réglementation sur le marchais français, et pour amener partout dans le monde les salaires au niveau des pays où ils sont au plus bas.

C’est en ce sens, et en ce sens seulement, que nous voulons protéger la main d’œuvre française contre la main d’œuvre étrangère, non pas, je le répète, par un chauvinisme d’esprit, mais pour substituer l’internationale du bien-être à l’internationale de la misère.

[…] je dis que l’allié le plus puissant du socialisme, dans l’ordre intellectuel bien entendu, c’est la doctrine protectionniste. Elle part absolument du même principe : réduite à la plus simple expression, elle affirme el droit et le devoir du gouvernement d’intervenir dans la distribution, dans l’emploi des capitaux ; elle affirme que le gouvernement a pour mission, pour fonction de substituer sa volonté qu’il tient pour la plus éclairée, à la volonté libre des individus. »

(Discours parlementaires. Recueillis et annotés par Edmond Claris. Tome premier, 1912, http://classiques.uqac.ca/classiques/jaures_jean/discours_parlementaires_t1/discours_parl_t1.html).

 

[4] Paul Boulland : « 28 septembre 1864 : naissance de l’Association Internationale des Travailleurs », Rétronews, 26/09/2017, https://www.retronews.fr/edito/28-septembre-1864-naissance-de-lassociation-internationale-des-travailleurs#.

 

[5] Par exemple, André-Jacques Holbecq sur Radio Ici et Maintenant, mi-mars 2012.

 

[6] Les organisations internationales (comme le Fonds Monétaire International, la Banque Mondiale) empêchent les cultures vivrières et promeuvent des cultures pour l'exportation envers les pays riches qui ne peuvent les produire, comme le coton au Mali, au Tchad, en Centrafrique. On empêche ainsi l'autosuffisance de ces pays pauvres.

 

[7] Olivier Le Cour Grandmaison : « L'argent des immigrés: le scandale », dans Médiapart,  25 février 2011 http://blogs.mediapart.fr/edition/article/250211/largent-des-immigres-le-scandale.