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Les transfusions de sang non chauffé et le sang soi disant contaminé par le VIH (Le sida et les hémophiles)

 

 

 

[A] Anne-Marie Casteret, 1992: L'Affaire du sang (La Découverte)

[B] Mirko D. Grmek, 1989, 1995: Histoire du sida (Payot 1995)

[C] Sophie Coignard et Alexandre Wickham: L'Omertà française (Albin Michel 1999)

[D] Éric Giacometti: "Polémique autour d'un chercheur mis sur écoute", dans Le Parisien, 11 janvier 2002, p.11.

[E] Armelle Thoraval: "Pour la justice, l'affaire du sang n'a pas eu lieu, dans Libération, jeudi 19 juin 2003, p. 2.

[F] Guillaume Perrault: "Le procès du sang contaminé n'aura pas lieu" dans Le Figaro, 19 juin 2003, p. 9.

[G] Edmond-Luc Henry: "Un déni de justice", interview dans Le Figaro, 19 juin 2003, p. 9.

[H] Louis-Marie Horeau: "La justice contaminée", dans Le Canard enchaîné, Nº 4313, 25 juin 2003, p.1.

[I] Edgar Morin, 1994: Une Année Sisyphe (Le Seuil, 1995) [citant p. 64-65 Le Généraliste du 18 février 1994].

 

- Dans les années 1970, on apprend que le chauffage des facteurs antihémophiliques tue des virus, en particulier celui de l'hépatite B. Jean-Pierre Soulier a cosigné avec Blatix et Anne-Marie Couroucé un article sur ce thème en 1972: "Prevention of Virus B Hepatitis", Amer. J. Dis. Child., 123, p. 429-434 [A:75].

- En août 1982 au Bellevue Hospital de New York, le sida fut diagnostiqué chez un malade transfusé qui ne présentait dans son anamnèse aucun autre facteur de risque. Craignant de faire un faux pas et de s'attirer le courroux de puissantes institutions, les rédacteurs de plusieurs revues médicales, dont le New England Journal of Medicine et les Annals of Internal Medicine, rejetèrent le manuscrit relatant ce cas qui ne fut publié qu'en 1984, après la publication du cas de Rochester en novembre 1983. [B:267]. En 1984 T. J. Greenwalt reprocha à la rédaction des Annals of Internal Medicine d'avoir publié des "informations anecdotiques" nuisant à la renommée des banques du sang; et le chef du centre de transfusion sanguine de New York, D. Black, s'est justifié en disant  qu'il ne faut pas crier au feu dans un théâtre plein de gens, car la panique peut faire plus de mal que le feu. [B:268]

- À la fin de l'été 1982, à partir de trois cas, les Centers for Disease Control (CDC) déterminent que le sida apparaît chez des hémophiles  qui avaient eu une transfusion sanguine et le publient sous le titre "Pneumocystis carinii pneumonia among persons with hemophilia A" dans le Morb. Mortal. Weekly Rep., 31, 1982, 365-367 [B:91, 270, 417]; plusieurs autres cas ont été rapidement signalés ensuite (par le médecin états-unien J.E. Groopman, en mars 1984, dans La Gazette du transfuseur p. 7, où il affirme aussi que le sida est devenu la deuxième cause de mort des hémophiles aux États-Unis d'Amérique du Nord, après les hémorragies).

- Le 13 janvier 1983, dans le New England Journal of Medicine, la rédactrice Jane Desforges signale que les cas de sida "sont plus fréquents chez les hémophiles qui utilisent des concentrés, issus de milliers de dons [2.500 à 20.000 dons [B:270]], que chez les adeptes de cryoprécipités à petits pools de donneurs. [A:68]. Desforges écrit: "Les médecins spécialistes de l'hémophilie doivent être avertis de ce risque dès maintenant. La prévention des complications du traitement doit d'ores et déjà prévaloir sur celle des complications de la maladie elle-même."

- Au début de 1983, Alberte Bonnet, issue de l'Institut Pasteur Production et qui avait participé à une méthode chimique pour tuer des rétrovirus dans un vaccin, entre au CNTS. Elle en démissionne le 12 juin 1984. Elle dit depuis: "Je ne travaillais pas dans le même service que Jean-Pierre Allain, chargé de la recherche et du développement, mais j'ai abordé plusieurs fois le problème. On m'a ignorée. Visiblement, je me mêlais de ce qui ne me regardait pas. Venant d'un milieu scientifique, habituée à la rigueur et à la critique, j'ai été très étonnée de l'amateurisme qui régnait au CNTS" [A:76].

- En mars 1983, on découvre aux États-Unis d'Amérique du Nord que le "VIH" peut être détruit par la chaleur (ou plutôt que le chauffage purifiait le sang???).

- En avril 1983, le gouvernement des États-Unis d'Amérique du Nord "recommande aux organismes chargés de collecter le sang de prévenir les personnes à haut risque de sida et d'écarter ainsi les donneurs potentiellement dangereux. " [A:69]

- Le 4 mai 1983, l'un des plus gros producteurs de dérivés sanguins, Travenol Hyland, écrit aux directeurs médicaux des centres de traitement des hémophiles: "notre firme a mis sur le marché un facteur antihémophilique traité par la chaleur (Hémofil T) afin de réduire le risque viral. [...] Nous pensons que l'utilisation d'Hémofil T ne peut qu'accroître la sécurité des patients." [A:73-74].

- Le 10 mai 1983, la même lettre est adressée au Dr Michel Garretta, adjoint de Jean-Pierre Soulier au CNTS, qui s'occupe des importations et des relations avec les firmes commerciales.

- Début mai 1983, le Quotidien du Médecin publie un article qui interroge la nécessité de "protéger les hémophiles en refusant d'importer des concentrés états-uniens et favoriser les facteurs coagulants français fabriqués avec le moins de donneurs possibles [...] Les deux médecins interviewés, les docteurs Bahman Habibi, du CNTS, et Jean-Baptiste Brunet, de la Direction générale de la santé, esquivent les questions.". Brunet dit: "Vous avez bien plus de chances d'être renversé par un camion en traversant la rue que d'attraper le sida." [A:70] Le président de la Société française de transfusion demande un droit de réponse qu'il qualifie de "mise au point pour éviter l'inquiétude qu'un tel article pourrait susciter dans le milieu médical" [A:71].

- Le 4 juin 1983, à l'Assemblée générale de l'AFH (Association Française des Hémophiles), son président André Leroux demande s'il serait possible de disposer de produits chauffés, comme Behring en produit en RFA depuis trois ans et Travenol aux États-Unis d'Amérique du Nord qui ne distribue plus qu'Hémofil T depuis quelques mois. Soulier répond que "Les injections de protéines chauffées sont susceptibles de donner des réactions à long terme. Il faudrait les comparer avec une série de produits non chauffés." Pourtant, les tests de validation, auxquels Jean-Pierre Allain a participé pour Travenol, avaient déjà démontré que le chauffage ne causait pas de problème immunitaire. [A:82] Le Dr Bierme de Toulouse, conseille de copier les Belges qui ne fabriquent ni n'importent de concentrés "et traitent tout le monde avec des cryoprécipités.", à partir de 7.000 donneurs réguliers contrôlés [A:89-90].

- Le 9 juin 1983, "un rapport "confidentiel" de Bahman Habibi à la commission signale qu'après examen de "2.300 hémophiles français, six [âgés de 10 à 17 ans] présentent des signes suspects de Sida". Trois "n'ont eu recours qu'à des concentrés nationaux." [A:71-72]. Pourtant il conclut: "Bien que les concentrés d'origine commerciale ne soient pas les seuls associés à l'existence d'anomalies, il semble qu'ils le soient davantage que les préparations d'origine nationale"! [A:72] Dans La Gazette du transfuseur paraît l'étude, tronquée de l'origine des produits sanguins utilisés, et donc du fait que la moitié des cas utilisait des produits exclusivement français; reste la conclusion sur la plus grande dangerosité des produits étrangers [A:73]. En septembre, le rapport sera publié in extenso dans la Revue française de transfusion et d'immuno-hématologie [A:73].

- En Juin 1983, le Dr Yvette Sultan, qui dirige le centre de soins aux hémophiles de l'hôpital Cochin, demande au CNTS l'importation de produits chauffés. Jean-Pierre Allain ne propose qu'une expérimentation. [A:77]. Elle écrit à Soulier qui répond: "La démonstration n'a pas été faite pour les virus dont nous possédons un marqueur [...]. Je ne suis pas hostile à ce que des fractions chauffées soient importées, sur une petite échelle et réservées à des sujets à risque. [...] Il ne faudrait pas qu'ils apparaissent brusquement et sans aucune démonstration scientifiques comme une panacée et qu'on les réclame pour l'ensemble des hémophiles. [...] Notre objectif à tous doit demeurer que la France soit capable de suffire à ses besoins" [A:78]. Ils ne projettent pas de mettre au point une méthode de chauffage en France pour éliminer le virus????.

- Le 20 juin 1983, une circulaire ministérielle recommande à tous les centres de sélectionner les donneurs de sang, "bien que la transfusion sanguine française ne constitue actuellement qu'un risque minime de transmission" du sida. [A:7&79]

- Fin juin 1983 [A:84], en août 1983 [C:267], le Pr Montagnier, dont un membre de son équipe, Barré-Sinoussi, a découvert le VIH, écrit au Pr Soulier afin de lui signaler le cas d'un hémophile B atteint de sida qui était séropositif selon les premiers tests de dépistage expérimentaux des anticorps contre le virus VIH, et que des techniques comme le chauffage du sang peuvent inactiver le virus.

- En septembre 1983, la firme autrichienne Immuno, qui vient de mettre au point sa propre méthode de chauffage des produits sanguins, démarche Jean-Pierre Soulier et Michel Garretta [C:267; A:85].

- Le 5 novembre 1983, lors de la réunion des adhérents de l'AFH de Midi-Pyrénées, Jean Ducos, président de la commission consultative, directeur du centre de Toulouse, "démolit magistralement le spectre du Sida", ce qui est cité dans L'Hémophile d'avril 1984, et il affirme qu'"aucun cas n'est encore signalé chez les hémophiles français", alors qu'un enfant hémophile est déjà sidéen [A:90].

- En novembre 1983, Jean-Pierre Soulier, dans son éditorial de la Revue française de transfusion, face au risque de contamination, invoque la solution de "recourir à des produits chauffés, en faisant l'hypothèse que l'agent inconnu du Sida serait inactivé par la chaleur". [C:267]

- En 1983, le CNTS a importé 17 millions d'unités de facteur VIII dont seulement 400.000 chauffées, alors que Travenol ne distribue plus que de l'Hémofil T par centaines de millions d'unités [A:90]. Yvette Sultan, Claire Gazengel, Yves Lorian qui travaille avec Marie-José Larrieu à Bicêtre, téléphonent plusieurs fois au CNTS pour demander du facteur VIII chauffé à Jean-Pierre Allain qui refuse, 3 millions seulement d'unités chauffées étrangères étant importées pour des études sur quelques dizaines d'hémophiles [A:92]. Yvette Sultan va rencontrer Jean Bernard, président de la Fondation nationale de transfusion, afin de lui faire part de ses difficultés à obtenir des produits chauffés. Il lui conseille de rencontrer le directeur général de la Santé, Jacques Roux, qui lui rétorque que l'importation est trop onéreuse [A:93]

- Début 1984, selon le questionnaire sur le comportement professionnel des 180 centres de transfusion sanguine, "plus du tiers des médecins interrogés avouèrent n'avoir pas tenté d'informer et plus de la moitié n'avoir pas instauré d'interrogatoire particulier lors de la visite médicale précédant le don." [A:8] "Seul un médecin sur dix citait tous les facteurs de risque connus, les autres oubliant de mentionner l'homosexualité, la multiplicité des partenaires sexuels ou la toxicomanie." [A:8]

- Le 13 mars 1984, une journée de coordination scientifique  lieu dans les locaux du CNTS aux Ulis. Les résultats d'études effectuées par Anne-Marie Couroucé, biologiste au CNTS, et Christine Rouzioux, virologue à l'hôpital Claude-Bernard, avec les premiers tests de dépistage, révèlent que les hémophiles français, même ceux qui n'ont utilisé pour se soigner que des produits français, sont déjà contaminés par le VIH, à 61% dans un service d'hémophiles graves souvent transfusés, à 10% dans un service d'hémophiles moins transfusés, contre 3% chez des hémophiles belges. Mais ce sondage-là sera resté secret durant plus d'un an [A:10, A:93-94].

- Le 22 juillet 1984 a lieu le congrès de Munich; le Pr Maurice Goudemand, directeur du CTS de Lille, qui sera le premier en France à faire chauffer les produits sanguins en avril 1985, dira au procès en appel qu'"Il est évident qu'après le congrès de Munich, le consensus était général sur la nécessité de proscrire des fractions à risque viral diminué" [C:267-268, A:105].

- Le 1er août 1984, le Pr Goudemand écrit à Soulier sur l'importance d'inactiver les virus dans les lots de sang. Soulier reporte la responsabilité sur son successeur après le 30 septembre, Garretta, qui ne donne pas suite à la demande de Goudemand [A:106].

- En novembre 1984, , dans un rapport de la Direction Générale de la Santé, le Dr Jean-Baptiste Brunet reconnaît l'efficacité du chauffage.

- En janvier 1985, les premières estimations permettent de suspecter que tous les lots du CNTS sont contaminés.

- En mars 1985, le Dr Brunet écrit dans une note au Pr Roux: "Il est probable que tous les produits sanguins préparés à partir de pools de donneurs sont contaminés."

- Un programme de dépistage obligatoire advient en mars 1985 aux États-Unis d'Amérique du Nord, au cours de l'été 1985 en France, Allemagne et dans quelques autres pays européens.

- Le 9 mai 1985, le Pr François Gros, conseiller du premier ministre Laurent Fabius et ancien directeur de l'Institut Pasteur, préside la réunion interministérielle (avec les cabinets ministériels de Georgina Dufoix et d'Edmond Hervé), où est décidé de retarder l'homologation du test Abbott du "VIH" afin d'avantager le test préparé en France par l'institut Pasteur. Lorsque à la mi-juin 1985, la presse donne l'alerte, le premier ministre annonce que le dépistage du Sida sur tous les dons de sang va devenir obligatoire, ce qui est officialisé par l'arrêté du 23 juillet. [C:268-269&273] Donc, ce 9 mai 1985, le ministère des Affaires sociales, suivi par celui du Budget, refuse que l'assurance maladie paie le test "VIH" en raison du surcoût (200 millions de F) pour la Sécurité sociale. Est aussi évoquée la nécessité de ne pas valider trop rapidement le test des États-Unis d'Amérique du Nord afin de favoriser le test français Diagnostics Pasteur, qui est enregistré le 21 juin.

- Le compte rendu confidentiel d'une réunion du 29 mai 1985 montre que les dirigeants du CNTS qui monopolise en France la mise sur le marché des produits sanguins, savaient que tous leurs lots de concentrés du facteur VIII étaient contaminés. Ils en ont averti les responsables politiques mais, pour éviter la perte financière et sauvegarder le prestige et les privilèges d'une institution, la décision fut prise de n'arrêter la distribution des médicaments porteurs de mort qu'après l'épuisement de leur stock.  [B:361-362].

- Le 3 juin 1985, Michel Garretta écrit à Robert Netter, au ministère de la Santé: "La probabilité de ne pas avoir de lots contaminés est malheureusement très faible.", ce qui lui permet de se couvrir en informant une autorité tout en niant la certitude [C:268]

- Le 23 juin 1983, le comité des ministres du Conseil de l'Europe fait une recommandation aux États membres "sur la prévention" de la transmission possible du "VIH" des donneurs contaminés aux receveurs de sang ou de produits sanguins [I:64-65]

- Le 26 juin 1985, dans une circulaire aux responsables du CNTS, le Dr Garretta écrit: "La distribution de produits non chauffés reste la procédure normale tant qu'ils sont en stock."

- Le 3 juillet 1985, Bahman Habibi signe une note précisant que pour les séropositifs VIH "les concentrés non chauffés doivent être utilisés jusqu'à l'épuisement des stocks."

- En juillet 1985, en France, le ministère de la Santé décrète qu'à partir d'octobre les produits sanguins non chauffés ne seraient plus remboursés, ce qui incite à consommer vite les anciens stocks.  Des stocks dangereux ont été distribués jusqu'en février 1986. [B:273]

- Jean Péron Garvanoff, un pianiste de jazz hémophile, fondateur de l'Association française des polytransfusés, fait la tournée de rédactions et des parlementaires pour attirer l'attention sur ce qu'il est le premier à considérer comme un scandale, et alerte le médecin et journaliste Anne-Marie Casteret. Il avait donné plusieurs concerts au domicile du Dr Allain, adjoint de Garretta, et entendait les conversations des médecins qui parlaient entre de la "casse" qu'il allait y avoir chez les hémophiles. Le 3 mars 1988, désespéré de ne pas être entendu, il porte plainte contre X pour non-assistance à personne en danger et délivrance de produits toxiques. Il est suivi par quelques malades. [C:269-270]

- Le 30 mars 1989, le magistrat Jean-Paul Jean, conseiller du ministre des Affaires sociales Claude Évin, écrit dans une note: "La solidarité des différents responsables qui s'était réalisée autour du silence éclate maintenant que les faits sont progressivement portés à la connaissance du public." [C:271]

- Le 12 avril 1989, Le Canard enchaîné publie une note de Michel Garretta aux distributeurs qui date de fin juin 1985 et stipule que "la distribution de produits non chauffés reste la procédure normale tant qu'ils sont en stock". [C:270]

- Le 27 juin 1989, le lieutenant-colonel de gendarmerie Jean-Louis Recordon entend Michel Garretta sur commission rogatoire du juge Sabine foulon, chargée d'instruire les plaintes déposées en mars 1988 par les hémophiles contaminés. [C:271-272].

- Le 11 juillet 1989 est signé un protocole prévoyant d'indemniser les hémophiles contaminés de 30.000 à 170.000 francs selon les cas, c'est le plan Évin par lequel les assureurs, l'Association française des hémophiles et le CNTS créent un fonds privé de 170 millions de F pour indemniser les hémophiles contaminés à condition qu'il renoncent à engager une action judiciaire.

- Le 17 novembre 1989, Jean-Paul Jean écrit dans une note: "Le débat [...] est en train de monter dangereusement [...]. Michel Garretta insiste beaucoup pour que le ministère prenne une position officielle sur ce qui s'est passé en 1985 pour éviter d'être seul à être exposé. Il menace implicitement de mettre en cause le ministère s'il n'est pas soutenu. Il est vrai qu'il y a eu à l'époque des choix politiques discutables entre mars et octobre 1985 (refus d'importer massivement les produits chauffés et de détruire les stocks, retard sur la mise en place pour favoriser le test Pasteur)." Il écrit aussi: "Je pense qu'il vaut mieux pour l'instant que ce soit les sommités médicales qui parlent sur le sujet [...]. Le ministre, lui, pourrait plutôt dire: "Les experts [...] pensent qu'il était impossible à l'époque d'éviter ces contaminations."" [C:270-271]

En novembre 1989 a lieu un attentat contre la voiture de Michel Garretta, revendiqué en accusant "le criminel et trafiquant d'or rouge Michel Garretta" d'avoir "pour le profit et pour conserver un monopole de fabrication et de distribution, écoulé des médicaments en sachant parfaitement qu'ils contamineraient et condamneraient à mort des enfants innocents". [C:273]

- Le 25 avril 1991, Anne-Marie Casteret publie dans L'Événement du jeudi le compte rendu de la réunion interne du CNTS le 29 mai 1985. [C:272] Elle révèle que le dépistage systématique du "VIH" dans les dons de sang a été freiné durant plusieurs mois en attendant l'élaboration du test français Pasteur. [F]

- Le 3 juin 1991, Michel Garretta est acculé à la démission de la direction du CNTS, en empochant 3 millions de francs d'indemnités. [C:272]

- En automne 1991, Michel Garretta, directeur du CNTS et Jean-Pierre Allain, conseiller scientifique au CNTS, sont inculpés de tromperie sur les qualités substantielles d'un produit; et Jacques Roux, directeur général au ministère de la Santé, et Robert Netter, directeur du Laboratoire national de la santé, sont inculpés de non-assistance à personne en danger. Leur procès, débuté le 22 juin 1992, se termine le 23 octobre par la condamnation de Garretta, Allain et Roux. Le 13 juillet 1993, la cour d'appel de Paris rend un jugement plus sévère, aggravant les peines et en condamnant aussi Netter. [B:362].

- Le 20 décembre 1991, le tribunal administratif de Paris reconnaît la responsabilité de l'État pour la contamination d'un hémophile, avec une indemnisation de 2 millions de F en réparation de la faute commise par l'État qui n'a pas interdit, à partir du 12 mars 1985, (note du Dr Brunet au directeur de la Santé) la distribution de produits sanguins à partir de pools de plasma estimés contaminés. Ce tribunal a situé entre le 12 mars 1985 et le 19 octobre 1985 la période durant laquelle l'État pouvait être jugé responsable.

- La loi du 31 décembre 1991 crée un fonds public pour indemniser les victimes du virus "VIH" contaminés par l'injection d'un produit sanguin ou un dérivé du sang. [Nicolas Guy, 1996: "La responsabilité médicale (Flammarion), p. 92]

- Le 31 mars 1992, la Cour européenne des droits de l'homme condamne la France pour la lenteur des juridictions administratives à indemniser un hémophile contaminé en 1984 et décédé en 1992.

- Le 9 avril 1993, le Conseil d'État avance la période de responsabilité au 22 novembre 1984 au lieu du 12 mars 1985.

- En juin 1994, la Cour de cassation juge qu'il n'y a empoisonnement que s'il y a intention de tuer. [H]

- En 1993, l'Organisation Mondiale de la Santé recense 24.200 cas de sida en France, 9.600 en Allemagne, 7.300 au Royaume-Uni [I:116].

- Le 26 août 1994, la Cour européenne des droits de l'homme condamne la France pour durée excessive de la procédure d'indemnisation d'un hémophile contaminé.

- En 1999, la Cour de justice de la République juge l'ex-premier ministre Laurent Fabius, l'ex-ministre des Affaires sociales Georgina Dufoix, tous deux relaxés, et l'ex-secrétaire d'État à la Santé Edmond Hervé, déclaré coupable d'"homicides et blessures involontaires" mais dispensé de peine. [F]

- En 1999, au bout de cinq ans d'enquête, la juge d'instruction Marie-Odile Bertella-Geffroy demande le renvoi aux assises des 30 personnes mises en examen. [F]

- En 2000, une loi initiée par le sénateur Pierre Fauchon renforce les exigences sur la démonstration d'un lien de causalité entre faute et dommage [E]

- Le 4 juillet 2002, la cour d'appel de Paris prononce un non-lieu général [E]

- Le 18 juin 2003, le Cour de cassation confirme le non-lieu général, contre le parquet général de Paris qui estime dans son pourvoi que l'arrêt "procède souvent par voie d'affirmations sans étayer son raisonnement", et alors que l'avocat général qui plaidait le non-lieu, concédait que la cassation était justifiée pour des motifs de forme (rappelons que la cassation ne doit juger que la forme...). [F] La cour de cassation argumente que pour empoisonner, il faut avoir l'intention de tuer et pas uniquement savoir que le produit utilisé contamine un virus mortel, et que "l'incertitude demeure sur l'existence d'un lien de causalité entre les faits reprochés et le dommage", c'est-à-dire qu'on ignore quel jour et avec quel lot ont été contaminées des victimes qui étaient transfusées quotidiennement... [G; H]

 

- Olivier Duplessis, président de la fédération des associations de victimes d'affaires sanitaires et alimentaires, affirme que dans l'affaire du sang contaminé, il y a eu des écoutes téléphoniques. [D:11]