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Le philosophe

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Autobiographèmes philosophiques

 

 

Je rapporte ici des souvenirs de façon éparse, car je n'en connais pas l'ordre chronologique et ne peux guère les relier entre eux.

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Enfant, je croyais qu'apprendre un langage étranger consistait à apprendre à convertir les sons ou les lettres d'un langage à l'autre.

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Enfant, en regardant la télévision, je m'étonnais d'avoir l'impression que le présentateur ou journaliste qui regardait la caméra, me regardait quelle que soit ma position devant l'écran du téléviseur; je m'éloignais de l'axe du téléviseur, m'approchant du plan de l'écran, mais rien n'y faisait: l'impression subsistait.

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Comme à beaucoup d'enfants de ma société, les adultes m'ont fait croire qu'un personnage, le Père-Noël, apportait des cadeaux chaque année une nuit proche du solstice d'hiver. Je me souviens d'une dispute collective entre deux groupes d'enfants dans la cour de l'école, moi faisant partie de ceux qui affirmaient la réalité de ce personnage. Un jour, j'avais je crois sept ans, ma sœur m'a dit la vérité. J'ai ressenti une impression de trahison, et dorénavant une méfiance envers le discours autoritaire.

Deux thèmes ont suscité mon interrogation: la religion et la sexualité. Lors des catastrophes et horreurs relatées au journal télévisé, mon grand-père disait qu'un nuage avait empêché au dieu, bon et tout-puissant, auquel croyait ma grand-mère de voir ce qui advenait. Les explorations astronautiques me semblaient prouver qu'il n'y avait ni dieu, ni paradis dans le ciel. Je m'interrogeais sur ce que pouvaient croire les déistes, et pourquoi. Sur la sexualité, je ne comprenais as pourquoi c'était un thème tabou, pourquoi ce plaisir avait tant d'interdictions.

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Devant ma curiosité et mes questions, vers neuf ans, la tante m'appelait « la poule gratteuse » ou « la mouche à merde ».

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Vers quatorze ans, j'imaginais qu'il y avait une imbrication infinie des "mondes", des "cosmos", et que dans une particule de matière du notre, il y avait un monde similaire en miniature, et que le nôtre constituait une particule d'un autre gigantesque; j'imaginais un récit où notre monde faisait partie d'un individu qu'une maladie atteignait, menaçant de destruction notre monde.

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Si j'ai commence cette encyclopédie, c'est (aussi) parce que j'avais un problème de mauvaise éducation: incomplète, contradictoire; souvent donc, je ne savais pas quoi faire, j'hésitais, m'interrogeais.

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À quinze ans, à l'école, j'apprenais en cours de sciences physiques la résolution d'équations différentielles selon lesquelles, à partir de l'état d'un système (matériel)  en mouvement, on pouvait calculer tous ses états antérieurs et ultérieurs. Je suis devenu déterministe.

Par la suite, je me suis demandé ce qu'étaient la liberté, la volonté, la conscience, dans cette perspective.

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Lors de la première moitié de l'été, un à deux mois avant mon dix-septième anniversaire, je m'ennuyais ferme chez mon père et sa compagne, fort peu causants avec moi, étrangers à mes préoccupations, dans un village où je ne connaissais qu'eux, Coltainville sur cette morne plaine céréalière qui entoure Chartres. Cette absence de communication, cette solitude, m'ont conduit à un stade proche de la psychose naissante. J'écrivais constamment, je me prenais pour une sorte d'antéchrist et l'unique manifestation un peu physique, corporelle, hallucinatoire que j'avais était celle, le soir couché dans un canapé pour dormir, que j'avais dans une obscurité totale (à laquelle j'étais peu habitué par la ville — d'ailleurs la fermeture quotidienne des volets, qu'on m'exigeait, devint pour moi un problème, et je sentais une aliénation dans l'obéissance à une injonction qui n'était pas justifiée. Une fois, je leur écris un mot auquel, toujours taiseux de ce qui n'était pas dans le cercle étriqué de leurs préoccupations, ils n'ont daigné apporter aucune réponse), d'avoir l'impression que mon corps basculait en arrière, vers le bas, selon un axe qui traversait mes pieds. Je me suis mis à vouloir écrire tout ce que je pensais, frénétiquement.

À seize ans et dix mois, donc, j'ai voulu/tenté de tout mettre au clair par écrit, tout réduire à des problèmes fondamentaux. Ça a commencé par la distinction entre ce que j'appelais «l'état primaire de la matière-mouvement» (la réalité) et «l'état secondaire de la matière-mouvement» (la représentation), tout ce qui est image, langage, pensée, dessin, photographie, etc. C'est devenu le premier chapitre de l'encyclopédie: "Réalité et représentation".

Toute la suite de mon parcours philosophique est consignée dans le journal philosophiques que j'ai alors commencés à écrire.

 

Néanmoins, je veux aller plus loin dans la genèse de ma volonté de faire cette encyclopédie.

Mes parents étaient séparés depuis avant ma naissance. J'ai su longtemps après que ma mère avait pensé se faire avorter. Jusqu'à mon adolescence, mon père, qui travaillait aux alentours,  venait deux à quatre soirs du début de semaine dormir dans l'appartement; il dormait sur le canapé du salon, ma sœur, de huit ans mon aînée, dormait dans sa chambre et je dormais dans le même lit que ma mère, jusqu'à mes onze douze ans, lorsque ma sœur est partie. Mon père vivait le reste de la semaine à la campagne avec sa nouvelle conjointe; parfois, ma mère m'envoyait en week-end là-bas, voire pour des vacances, ce qui m'était pénible; mon père parlait peu et il était difficile d'avoir des conversations avec lui; ma mère avait un métier commercial et des horaires variables; elle rentrait tard et j'étais souvent seul à la maison; la télévision était ma nounou; ma mère avait un amant, un homme marié qui venait souvent déjeuner à midi et qu'elle présentait hypocritement, mensongèrement comme un "ami", alors qu'elle ne recevait jamais d'amis à la maison.

 

Ma mère a psychiquement abusé de moi; adolescent, elle ne voulait penser mes problèmes que comme une crise d'adolescence, alors que je lui disais que ce n'était pas une crise d'adolescence.

Ma mère me trimballait comme un rempart contre les autres. Sans éducation établie, il m'aura fallu tenter de reconstruire des repères.

 

J'envisage mon œuvre philosophique comme un sacrifice nécessaire causé par une mauvaise éducation, une mauvaise instruction, un mauvais environnement social.

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La vérité, je l'ai toujours voulue, elle m'a souvent été refusée.

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Enquête familiale dans les autobiographèmes: les événements que je n'ai pu découvrir qu'après leur existence.

La conjugalité de mes parents a commencé avec l'existence de ma sœur: ma mère étant involontairement enceinte, ils se sont mariés. Ils se sont séparés autour de ma naissance, huit ans après, lorsque mon père a rencontré une autre femme qui lui convenait mieux, et ma mère a fait une dépression. J'ai compris que si cela avait été autorisé, j'aurais été avorté.

Mon père était un homme interpsychiquement infirme. Sa mère et son père l'avaient eu involontairement, à vingt ans et dix-neuf ans (mon père aussi avait quelque huit mois de moins que ma mère). Elle le délaissait beaucoup, s'en occupait guère, était autoritaire et dominait son mari. Elle l'a empêché de faire les études technico-scientifiques qui lui étaient proposés pour ses talents mais elle a refusé, l'a mis au travail et lui a volé ses payes. Fâché, il ne les a as revus jusqu'à ce qu'ils le recontactent, ce qui fait que je ne les ai vus qu'à partir de seize ans.

Ainsi que son père, le grand-père paternel de ma mère était un homme autoritaire.