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Sommaire de l'anthologie

L'anthologiste

Cont@ct

 

Plaute

 

 

Plaute est né vers -254 au nord-est de l'Italie, à Sarsina, ville qui n'était romaine que depuis -266. Après avoir exercé divers métiers, il put vivre de l'argent que lui rapportèrent la vingtaine de pièces de théâtre qu'il écrivit. Il est mort en -184.

 

La Comédie des ânes

Acte V

Scène première

Déménète: - Cela ne t'est pas désagréable, mon fils, si elle prend place à côté de moi?

Argyrippe: - La piété, mon père, épargne le chagrin à mes yeux; j'ai beau être amoureux d'elle, je puis cependant me résigner à ne pas être fâché qu'elle soit auprès de toi.

Déménète: - Il faut qu'un jeune homme soit respectueux, Argyrippe!

Argyrippe: - Certes, mon père, et tu mérites bien que je le sois.

Déménète: - Allons, dans ces conditions, passons un repas plaisant, à boire et à converser agréablement;  je ne veux pas qu'il y ait de la crainte, je préfère qu'il y ait de l'affection, mon fils, entre toi et moi.

Argyrippe: - Mais, par Pollux, j'éprouve l'une et l'autre, comme le doit un fils.

Déménète: - Je te croirai, si je te vois joyeux.

Argyrippe: - Tu crois peut-être que je suis triste?

Déménète: - Je le crois, en voyant que tu es aussi chagrin que si l'on venait de te signifier une assignation!

Argyrippe: - Ne dis pas cela.

Déménète: - Ne sois pas ainsi, et aussitôt je me tairai.

Argyrippe: - Regarde-moi, tiens, je ris.

Déménète: - Puissent ceux qui me veulent du mal rire de la sorte!

Argyrippe: - Je sais bien, mon père, pourquoi tu crois que maintenant je suis triste avec toi: parce qu'elle est auprès de toi. Eh bien, certes, par Hercule, mon père, à te dire vrai, cela me tracasse; non que je ne souhaite pas ce que tu désires toi-même; mais je suis amoureux d'elle; si une autre était avec toi, je pourrais m'en consoler le plus aisément du monde!

Déménète: - Mais c'est celle-ci que je désire.

Argyrippe: - Donc, tu as ce que tu souhaites; moi, je voudrais bien avoir ce que je souhaite!

(Vers ~832-~847)

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Amphitryon

Acte III

Scène III

Sosie : - En vous voyant calmes, je suis heureux, cela me fait plaisir. C'est d'ailleurs ainsi que doit, à mon sens, se conduire un esclave honnête: tels seront ses maîtres, tel il sera lui-même; il modèlera son visage sur le leur; il sera triste si les maîtres sont tristes; il sera gai s'ils seront joyeux.

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Scène IV

Mercure: - Mon père m'appelle, je vais vers lui; j'obéis à son commandement. Comme un bon fils doit être pour son père, tel je suis à l'égard du mien. Quand il est amoureux, je lui sers de parasite, je l'encourage, je me tiens près de lui, je lui donne des conseils, je me réjouis avec lui. Si mon père éprouve quelque plaisir, j'en éprouve, moi, le plus grand bonheur. Il fait l'amour, il a raison; il fait bien, puisque c'est là son plaisir. C'est ce que tout le monde devrait faire, à condition que cela ne fasse pas de mal.

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La Comédie de la marmite

Acte V

Scène première

STROBILE : - Si tu me fais torturer jusqu'à la mort, qu'y gagneras-tu ? d'abord tu perdras un esclave ; de plus, tu n'obtiendras pas ce que tu désires. Mais si tu m'offrais en récompense la chère liberté, tu ferais de moi tout ce que tu voudrais, tu serais déjà satisfait. La nature nous a créés tous libres ; naturellement nous aimons tous la liberté. Le pire, le plus affreux des maux, c'est la servitude. Et le mortel haï de Jupiter commence par être esclave.

LYCONDE : - Il ne raisonne pas mal.

STROBILE  : - Écoute le reste. Dans notre siècle, les maîtres sont trop avares; de vrais Harpagons, des Harpyies, des Tantales ! Pauvres au sein de l'opulence, mourant de soif au milieu de la mer, il n'y a pas de richesses assez grandes pour eux, ni celles de Crésus, ni celles de Midas. Les trésors de la Perse ne pourraient pas combler le gouffre sans fond de leur cupidité. Les maîtres se comportent mal envers leurs esclaves; les esclaves le leur rendent bien. Ainsi, des deux parts, on est mécontent les uns des autres. L'office, le cellier, les armoires, sont fermés à triple serrure par de vieux ladres. Ce qu'ils accordent à peine à leurs enfans, des esclaves, adroits et rusés voleurs , le leur dérobent, et se jouent de leurs milliers de clés. Ils pillent, ils avalent, ils dévorent. Et jamais les gibets ne leur sauraient arracher l'aveu de leurs nombreux larcins. C'est ainsi que les drôles se dédommagent de leur servitude en riant et s'amusant. Je conclus donc que la libéralité fait les bons esclaves.

http://remacle.org/bloodwolf/comediens/Plaute/marmite.htm