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Sommaire de l'anthologie

L'anthologiste

Cont@ct

 

Le Mahabharata

 

La Bhagavad-Gîta

Le Bienheureux: - Et toi, si tu ne livres ce combat légitime, traître à ton devoir et à ta renommée, tu contracteras le péché;

Et les hommes rediront ta honte à jamais; or, pour un homme de sens, la honte est pire que la mort.

Les princes croiront que par peur tu as fui le combat: ceux qui t'ont cru magnanime te mépriseront;

Tes ennemis tiendront sur toi mille propos outrageants où ils blâmeront ton incapacité. Qu'y a-t-il de plus fâcheux? Tué, tu gagneras le ciel; vainqueur, tu posséderas la terre. Lève-toi donc, fils de Kuntî, pour combattre bien résolu. Tiens pour égaux plaisir et peine, gain et perte, victoire et défaite, et sois tout entier à la bataille: ainsi tu éviteras le péché.

Arjuna: - Si à tes yeux, guerrier redoutable, la pensée est meilleure que l'action, pourquoi donc m'engager à une action affreuse?

Mon esprit est comme troublé par tes discours ambigus. Énonce une règle unique et précise par laquelle je puisse arriver à ce qui vaut le mieux.

Le Bienheureux: - En ce monde, il y a deux manières de vivre; je te l'ai déjà dit, prince sans péché: les rationalistes contemplateurs s'appliquent à la connaissance; ceux qui pratiquent l'Union s'appliquent aux œuvres.

Mais en n'accomplissant aucune œuvre l'homme n'est pas oisif pour cela; et ce n'est pas par l'abdication que l'on parvient au but de la vie;

Car personne, pas même un instant, n'est réellement inactif; tout homme malgré lui-même est mis en action par les fonctions naturelles de son être.

Celui qui, après avoir enchaîné l'activité de ses organes, se tient, l'esprit occupé des objets sensibles et la pensée errante, on l'appelle faux dévot;

Mais celui qui, par l'esprit a dompté les sens et qui met en œuvre l'activité de ses organes pour accomplir une action, tout en restant détaché, on l'estime, Arjuna.

Fais donc une œuvre nécessaire: l'œuvre vaut mieux que l'inaction; sans agir tu ne pourrais pas même nourrir ton corps.

Hormis l'œuvre sainte, ce monde nous enchaîne par les œuvres. Cette œuvre donc, fils de Kuntî, exempt de désirs, accomplis-la.

Lorsque jadis le Souverain du monde créa les êtres avec le sacrifice, il leur dit: "Par lui multipliez; qu'il soit pour vous la vache d'abondance";

Nourrissez-en les dieux, et que les dieux soutiennent votre vie. Par ces mutuels secours, vous obtiendrez le souverain bien;

Car, nourris du Sacrifice, les dieux vous donneront les aliments désirés. Celui qui, sans leur en offrir d'abord, mange la nourriture qu'il a reçue d'eux, est un voleur.

Ceux qui mangent les restes du sacrifice sont déliés de toutes leurs fautes; mais les criminels qui préparent des aliments pour eux seuls, se nourrissent de péchés.

En effet, les animaux vivent des fruits de la terre sont engendrés par la pluie; la pluie, par le sacrifice; le sacrifice s'accomplit par l'Acte.

Or, sache que l'Acte procède de Brahma procède de l'Éternel. C'est pourquoi ce Dieu qui pénètre toutes choses est toujours présent dans le Sacrifice.

Celui qui ne coopère point ici-bas à ce mouvement circulaire de la vie et qui goûte dans le péché, les plaisirs des sens, celui-là, fils de Prithâ, vit inutilement.

Mais celui qui, heureux dans son cœur et content de lui-même trouve en lui-même sa joie, celui-là ne dédaigne aucune œuvre;

Car il ne lui importe en rien qu'une œuvre soit faite ou ne le soit pas, et il n'attend son secours d'aucun des êtres.

C'est pourquoi, toujours détaché, accomplis l'œuvre que tu dois faire; car en la faisant avec abnégation, l'homme atteint le but suprême.

C'est par les œuvres que Janaka et les autres ont acquis la perfection. Si tu considères aussi l'ensemble des des choses humaines, tu dois agir.

Selon qu'agit un grand personnage, ainsi agit le reste des hommes; l'exemple qu'il donne, le peuple le suit.

Moi-même, fils de Prithâ, je n'ai rien à faire dans les trois mondes, je n'ai là aucun bien nouveau à acquérir; et pourtant je suis à l'œuvre.

Car si je ne montrais une activité infatigable, tous ces hommes qui suivent ma voie, toutes ces générations périraient;

Si je ne faisais mon œuvre, je ferais un chaos, et je détruirais ces générations.

De même que les ignorants sont liés par leur œuvre, qu'ainsi le sage agisse en restant détaché, pour procurer l'ordre du monde.

Qu'il ne fasse pas naître le partage des opinions parmi les ignorants attachés à leurs œuvres; mais que s'y livrant avec eux, il leur fasse aimer leur travail.

Toutes les œuvres possibles, procèdent des attributs naturels (des êtres vivants), celui qui trouble l'orgueil s'en fait honneur à lui-même et dit: "J'en suis l'auteur";

Mais celui qui connaît la vérité, sachant faire part de l'attribut et de l'acte, se dit: "les attributs de l'âme se rapportent aux attributs de la matière" et il reste détaché.

Ceux qui troublent les attributs naturels des choses, s'attachent aux actes qui en découlent. Ce sont des esprits lourds qui ne connaissent pas le général. Que celui qui le connaît ne les fasse pas trébucher.

Rapporte à moi toutes les œuvres, pense à l'Åme suprême; et sans espérance, sans souci de toi-même, combats et n'aie point de tristesse.

Les hommes qui suivent mes commandements avec foi, sans murmurer, sont, eux aussi, dégagés du lien des œuvres;

Mais ceux qui murmurent et ne les observent pas, sachent que, déchus de toute science, ils périssent privés de raison.

Le sage aussi tend à ce qui est conforme à sa nature; les animaux suivent la leur. A quoi bon lutter contre cette loi?

Il faut bien que les objets des sens fassent naître le désir et l'aversion. Seulement, que le sage ne se mette pas sous leur empire, puisque ce sont ses ennemis.

Il vaut mieux suivre sa propre loi, même imparfaite, que la loi d'autrui, même meilleure; il vaut mieux mourir en pratiquant sa loi; la loi d'autrui a des dangers.

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Les Upanishads

La Katha Upanishad

Natchikétas

Quand un homme a cessé de vivre, il y a doute; les uns disent qu'il existe encore, d'autres qu'il n'est plus.

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La Kena Upanishad

Lorsque les trois grands dieux eurent dans un cachot

Mis les démons, chassé les monstres de là-haut,

Ôté sa griffe à l'hydre, au noir dragon son aile,

Et sur ce tas hurlant fermé l'ombre éternelle,

Laissant grincer l'enfer, ce sépulcre vivant,

Ils vinrent tous les trois, Vâyou le dieu du Vent,

Agni, dieu de la Flamme, Indra, dieu de l'Espace,

S'asseoir sur le zénith, qu'aucun mont ne dépasse,

Et se dirent, ayant dans le ciel radieux

Chacun un astre au front: "nous sommes les seuls dieux!"

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Livre I

Les débuts

Naissance des cent fils de Dhrtarastra, I, 115 7b-41a

Des vents se mirent à souffler et tout l'horizon s'embrasa. Effrayé, le roi Dhrtarastra rassembla de nombreux brâhmanes, Bhisma, Vidura et ses autres amis de même que tous les Kuru et il leur dit:

- Le prince Yudhisthira est le premier-né et il est destiné à perpétuer notre lignée. De par ses propres vertus, la royauté lui revient; nous n'avons rien à dire là-dessus. Mais mon fils né tout de suite après deviendra-t-il roi lui aussi? Dites moi clairement ce qu'il doit en être en vérité.

Il avait à peine fini de parler que l'on entendit de partout résonner les cris funestes des chacals et des épouvantables bêtes mangeuses de chair crue. Devant ces terribles présages venus de toutes parts, les brâhmanes et l'intelligent Vidura lui dirent:

- O souverain des hommes, de sinistres présages se sont manifestés dès que ton fils aîné a vu le jour. Il est clair que ce fils causera la perte de notre lignée. Son abandon conjurerait ce malheur, le garder serait une erreur énorme. Il te restera quatre-vingt-dix-neuf fils: renonce donc à cet unique enfant si tu veux préserver ta lignée de cette calamité. Assure ainsi la sécurité des tiens et du monde. Un simple individu doit être abandonné dans l'intérêt d'un village, un village dans l'intérêt d'une contrée et la terre elle-même dans l'intérêt de l'atman. (traduction de Jean-Michel Péterfalvi)

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Montée des tensions, I, 132 1-15 et 61-79, 133 1-22, 136 21-41, 137 1-25

Il en va des héros comme des fleuves: il est bien difficile de trouver leur source. C'est de l'eau qu'a surgi le feu qui pénètre les créatures mobiles et immobiles. C'est d'un os de Dadhica qu'a été fait le foudre exterminateur des démons.

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Le svayamvara et le mariage de Krsna Draupadi, I, 185 4-37

Les jeunes princes aux oreilles ornées de boucles se jalousaient. Pensant chacun être le plus fort et le plus doué pour les armes, ils se levèrent tous en dressant leurs arcs. Leur beauté, leur vaillance et leur haute lignée, leur vertu, leur fortune et leur jeunesse attisaient leur orgueil. Ils étaient excités comme des éléphants en rut au front suintant sur le mont Himavat. S'entre-regardant avec un sentiment de rivalité, tout entiers submergés par l'Amour, ils se levèrent brusquement de leurs trônes. "Krsna est pour moi!" disait chacun. Les ksatriya réunis dans l'arène pour conquérir la fille de Drupada étaient comme les troupes des dieux rassemblés (pour conquérir) Uma, la fille du roi Parvata. Lorsqu'ils descendirent dans l'arène pour tenter d'obtenir la fille de Drupada, les princes succombaient sous les flèches de l'Amour vers elle, ils se mirent à haïr même leurs propres amis.